mardi 13 janvier 2009

Gaza. « Même la vie des chiens n’est pas aussi dure… »

Gaza . L’offensive de l’armée israélienne s’est encore intensifiée hier, provoquant toujours plus de morts et de destructions. Au moins 900 Palestiniens ont été tués dont près de 300 enfants.

C’est à la nuit tombée que la peur oppressante qui vous colle à la peau devient plus insupportable encore. Sous les bombes israéliennes les immeubles s’enflamment. Celles au phosphore blanc qui sont utilisées, éclatent en filaments destructeurs, sectionnant les membres des populations visées. « Les bombardements n’ont pas arrêté. Ils ont particulièrement tiré avec les chars et utilisent des bombes au phosphore blanc », témoigne Zoher depuis le sud de la bande de Gaza. « C’est très dangereux. Les gens qui habitent les frontières du côté de l’est de Khan Younès, à côté de la frontière israélienne, sont particulièrement touchés par le phosphore blanc. Il y a beaucoup de blessés. Ils ne peuvent pas respirer correctement. » Depuis dix-sept jours lui et sa famille n’ont pas un moment de répit. « On se recroqueville dans le coin d’une pièce et on écoute les avions. À chaque fois on se demande si notre dernière heure n’est pas arrivée, si ça ne va pas nous tomber dessus. Même la vie des chiens n’est pas aussi dure. »

Hier, les forces israéliennes ont progressé plus en profondeur dans les zones urbaines de la bande de Gaza, épaulées par les blindés qui pénétraient dans les quartiers. « Dimanche soir, des fumées d’explosions se sont élevées au-dessus de la ville de Gaza, tandis que des tirs nourris résonnaient au sud de l’agglomération. Ce matin, des navires de guerre israéliens ont envoyé plus de 25 obus sur la ville et sur les camps de réfugiés, provoquant de nombreux incendies », explique Walid Al Awad qui vit dans Gaza.

« Dans la nuit de dimanche à lundi, les chars israéliens ont tenté de pénétrer dans la ville mais ils n’y sont pas arrivés. » Ils laissent néanmoins derrière eux des dizaines de corps, particulièrement à Zeitoun, à Beit Lahyia mais aussi plus au sud. Quinze Palestiniens ont été tués dans la matinée dans des raids ou par des obus de chars israéliens, ou ont succombé à leurs blessures, portant à 905 le bilan des Palestiniens tués par l’offensive israélienne, entrée dans sa 17e journée, selon le chef des services d’urgence à Gaza, Mouawiya Hassanein. Parmi les morts, figurent 277 enfants, 95 femmes et 92 personnes âgées, a-t-il précisé. Plus de 3 950 Palestiniens ont en outre été blessés dans les attaques israéliennes depuis le début de l’offensive le 27 décembre. Treize Israéliens, dont dix soldats, ont été tués au cours de la même période.

« Rien de changé depuis le début »

« Comme si ça ne suffisait pas, ils bombardent des places vides et disent qu’il y a des bases d’où la résistance palestinienne envoie les roquettes Kassam », dénonce Zoher. « Rien de changé depuis le début. Les Israéliens ne respectent même plus le cessez-le-feu de trois heures. On a entendu de fortes détonations. Les chars ont avancé dans la nuit et se sont positionnés à quelques mètres en zone palestinienne. Ils sont venus avec les bulldozers, arrachent les arbres, détruisent les maisons. »

L’armée israélienne a également effectué une incursion dans la localité de Khozaa, près de Khan Younès dans le sud du territoire, où elle a détruit 35 maisons. Interdisant aux journalistes de pénétrer dans ces zones, l’armée israélienne en profite pour développer sa propagande. Une porte-parole militaire, le commandant Avital Leibovitch, se répand complaisamment en accusant les Palestiniens d’avoir truffé de bombes artisanales et de chausse-trappes les quartiers d’habitation, et parle de mannequins à l’entrée des appartements qui ont l’allure de combattants palestiniens et explosent à l’approche des militaires israéliens. Le but est clair. Pas un mot en revanche sur les témoignages de plus en plus horribles qui parviennent de la bande de Gaza. « Il n’y a pas d’électricité dans certaines zones depuis dix jours », dénonce Zoher qui doit lui-même se débrouiller avec des appareils de fortune. « Pour les civils c’est très dur. On manque de farine, de pain. Les Israéliens ont tapé sur les hangars où c’était entreposé. »

Que va-t-il maintenant se passer ? L’arrivée des réservistes israéliens ne plaide pas pour une fin rapide de l’offensive. Israël a aussi reporté la visite d’un de ses émissaires en Égypte qui devait y discuter d’un cessez-le-feu. Si les Palestiniens de Gaza sont martyrs en Israël, tout se passe comme si de rien n’était. L’information du bombardement d’une école de l’ONU, la semaine dernière, qui a fait plus de trente morts, a par exemple été reléguée en page 8 du Yediot Aharonot. Les chaînes de télévision diffusent leurs programmes habituels. L’enfer, c’est chez les autres

DES BOMBARDEMENTS TRÈS INTENSES

Le dirigeant du Hamas Ismaïl Radouane a précisé que son groupe n’envisagerait pas un cessez-le-feu avant qu’Israël ne suspende ses attaques et se retire de Gaza. Il a demandé l’ouverture de tous les points de passage, spécialement celui de Rafah avec l’Égypte. Mais les plans militaires israéliens dans la bande de Gaza prévoient, entre autres scénarios, l’occupation de l’étroite bande de terre qui sépare le territoire palestinien de l’Égypte, appelé le couloir de Philadelphie. Les bombardements ont été particulièrement intenses. Une telle option serait particulièrement grave et représenterait un camouflet pour les Occidentaux qui, une fois de plus, parlent d’une prochaine sortie de crise alors qu’Israël cherche avant tout à terminer le travail.

Or, si l’on prend au mot les raisons du déclenchement de cette agression, le but n’est toujours pas atteint puisque la résistance palestinienne continue à lancer des roquettes. Une action plus symbolique qu’autre chose. En attendant, « la nuit sera dure », prévient Walid Al Awad. Il a participé à une réunion de plusieurs organisations palestiniennes (il représente lui-même les communistes du PPP) pour étudier la situation politique et humanitaire. « Il y a de plus en plus de gens qui n’ont aucun endroit où dormir soit parce que leurs maisons ont été détruites, soit parce qu’ils ont fui les zones de combat », souligne-t-il.

Source L'Humanité

Aucun commentaire: