dimanche 27 janvier 2008

Un président noir ?



La possibilité que Barack Obama soit élu premier président noir des Etats-Unis, alors que 40 ans auparavant il y aurait vécu l’ordinaire de la ségrégation, montre le chemin parcouru vers l’égalité raciale en Amérique mais aussi ses limites.
Avec sa victoire dans l’Iowa (centre) et son bon score dans le New Hampshire (nord-est), le sénateur démocrate de l’Illinois a fait taire ceux qui pensaient que sa couleur et son parcours singulier représenteraient un handicap insurmontable auprès de l’électeur américain.
Visage juvénile, sourire radieux dans un portrait en couverture, Barack Obama, claironnait récemment le magazine Newsweek dans un éditorial, “ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire d’un pays où le problème racial a été pudiquement appelé le dilemme américain”.
“Barack Obama présente une vision tentante de l’Amérique, essayant de combler le fossé des races, des classes et de réunir des coalitions de gens capables de faire bouger les choses”, analyse Ron Walters, professeur d’études politiques et afro-américaines à l’université du Maryland.
Le candidat démocrate, métis né à Hawaï d’un père africain du Kenya et d’une mère blanche du Kansas, ayant vécu une partie de son enfance en Indonésie, se présente comme le candidat de tous.
Au delà de la couleur de la peau, dit-il à longueur de discours, “nous sommes une nation, nous sommes un peuple et le moment du changement est venu”. Il n’est pas le premier homme politique noir à se lancer dans la course à la présidence. Mais il appartient à une nouvelle génération qui n’est pas issue de la lutte pour les droits civiques et a bénéficié des progrès qu’elle a générés.
Diplômé des universités Columbia et de Harvard, où il a été le premier noir à diriger la prestigieuse Harvard Law Review, seul sénateur noir du Sénat, Barack Obama semble avoir transcendé les barrières raciales du passé. Certains commentateurs le décrivent même comme un “Tiger Woods” de la politique et se prennent à rêver à une ère “post-raciale” aux Etats-Unis.
“Absurde” rétorque Ron Walters à l’AFP, évoquant les soubresauts raciaux qui déchirent toujours le pays. “Songez à ces deux dernières années: Katrina, Jena, (une ville de Louisiane secouée par une affaire de racisme dans laquelle six jeunes Noirs ont été inculpés de tentatives de meurtre après l’agression d’un Blanc), les récentes manifestations contre le racisme devant le département de la Justice”.
Les dernières escarmouches d’une campagne de plus en plus féroce démontrent que le thème racial constitue toujours un terrain miné. En disant que “le rêve du docteur King a commencé à se réaliser quand le président Lyndon Johnson a passé la loi sur les droits civiques en 1964″ et qu’il avait fallu “un président pour le faire”, Mme Clinton a froissé une partie de la communauté noire.
“Mme Clinton a réussi à insulter un leader noir respecté dans sa tentative forcenée d’insulter un leader noir qui prend de l’importance”, s’indigne une éditorialiste noire dans le Washington Post. “La question raciale utilisée subtilement ou avec brutalité figurera sans aucun doute” dans la campagne à venir, prédit-elle.
“La carte raciale est sur la table dans cette élection et elle va y rester” assure pour sa part le magazine en ligne Politico. Notamment dans les Etats du sud où les préjugés sont encore très présents.
Après les caucus du Nevada samedi, les candidats démocrates se mesureront le 26 janvier en Caroline du Sud où 50% des électeurs sont noirs. Dans cet Etat, l’anniversaire de Martin Luther King, devenue une fête nationale depuis 1986 et célébré le troisième lundi de janvier, sera observé pour la première fois cette année.

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