dimanche 28 décembre 2008
Arabes et Noirs en politique française Entretien avec Vincent Geisser et El Yamine Soum
Comment la « diversité » a-t-elle passé ces élections municipales ?
Vincent Geisser & El Yamine Soum : Sur la question de la diversité, les municipales ont eu une allure de test de rattrapage par rapport aux législatives. Chacun se souvient de l'échec qu'ont connu les candidats de la diversité durant les élections législatives de juin 2007. A part George Pau-Langevin, dans le 20e arrondissement de Paris, ce fut une grosse déception. Cependant on a pu constater que les appareils politiques ont évolué et qu'ils pouvaient désormais envisager la candidature de certains de leurs militants qui sont issus de l'immigration maghrébine, africaine ou des candidats issus des départements et territoires d'Outre-mer. Les espoirs déçus aux législatives se sont reportés sur les municipales malgré la différence du type de scrutin. Les partis politiques ont fait des promesses surtout dans les grandes villes comme Paris, Lyon, Strasbourg etc. Ces promesses ont été faites à gauche comme à droite. Malheureusement, loin d'être un "rattrapage républicain", les résultats des municipales 2008 sont plutôt contrastés du point de vue de la "diversité" : de nombreux candidats issus de l'immigration maghrébine, africaine et des DOM-TOM ont été élus mais généralement à des postes de conseillers et d'adjoints et rarement de maires. On perçoit ici les limites de la diversité en politique : les "Arabes" et les "Noirs" sont tolérés dans les instances de pouvoir mais le "véritable pouvoir" (maires, députés, présidents de conseils généraux, etc.) ne leur revient jamais. Dans notre ouvrage, Discriminer pour mieux régner (éd, l'Atelier, mai 2008), nous parlons d'ailleurs à ce propos de "diversité cosmétique", voire de "diversité homéopathique", c'est-à-dire d'une diversité injectée à très petite dose dans le système politique français pour ne pas remettre en cause les positions acquises par les notables.
Qu'est ce qui explique cette montée de la diversité en politique que vous constatez ?
Vincent Geisser & El Yamine Soum : L'engouement général pour la thématique de la « diversité » est à inscrire dans le cadre plus général du débat sur les discriminations. Car c'est bien de cela dont il s'agit. La « diversité » n'est en fait qu'une forme de « discrimination positive » qui ne dit pas son nom. Les responsables politiques français éprouvent une certaine "pudeur républicaine" à parler de "discrimination positive", alors ils préfèrent employer des formules voilées telles que "diversité" : c'est plus "doux" et plus "exotique" et ça choque moins les oreilles chastes. Depuis plusieurs années, l'on observe un véritable effort de lutte contre toutes les discriminations en France. On assiste à une prise de conscience d'une forme de discrimination qui se traduit par l'absence, ou le faible taux, de leaders politiques parmi les Français issus de l'immigration maghrébine ou noire africaine, alors que ces populations sont présentes dans les rangs des partis politiques depuis de longues années. D'où une volonté d'injecter une certaine dose de "diversité" dans la classe politique comme pour se déculpabiliser ou pour répondre à un impératif moral de lutte contre les discriminations. Parce que, si vous regardez de plus près, la classe politique française, aujourd'hui, est encore très masculine, très blanche et grisonnante, loin de refléter la diversité sociologique de l'électorat français.
A la fin de ces municipales de mars 2008, est-ce le statu quo ?
Vincent Geisser & El Yamine Soum : Ces municipales n'ont pas apporté de révolution à l'échelle nationale. Mais en même temps, il serait inexact de parler de statu quo. Ceci parce que, d'une part, la ligne a bougé. En 1989, nous avions recensé environ 150 conseillers municipaux issus de l'immigration maghrébine sur l'ensemble du territoire. Aujourd'hui, ce nombre est largement dépassé. Les conseillers municipaux de la "diversité" se comptent par milliers. Dans la seule ville de Paris, on peut dénombrer cinq adjoints au Maire issus de l'immigration maghrébine, africaine et des DOM-TOM. Et on pourrait multiplier les exemples pour d'autres grandes villes françaises. Mais, d'autre part, le système est tel que le vrai pouvoir local est détenu par le maire. Or, on observe que l'évolution du nombre de conseillers municipaux Noirs ou Arabes, n'est pas accompagnée par une évolution à la hausse des maires dits de la "diversité". Cela laisse, au final, un bilan assez mitigé. On a l'impression que plus l'on se rapproche des postes de pouvoir et de décision, plus la « diversité » s'étiole et finit par être écartée, tels des rayons de soleil dans un ciel blanc.
Justement, qu'est-ce qui empêche les Noirs ou les Arabes de briguer des mairies en France ?
Vincent Geisser & El Yamine Soum : A notre sens, il faut lire cela à la lumière du conservatisme de nos politiques. C'est moins du racisme que du placisme (la guerre pour conserver sa place : la lutte des places a chassé la lutte des classes). Nos femmes et surtout nos hommes politiques français sont très conservateurs : ils refusent de lâcher facilement leurs privilèges politiques et font tout pour se cramponner à leurs postes. Notre système politique fonctionne un peu comme une "monarchie républicaine", avec son roi (le président) et sa cour (les notables) et son opposition officielle (qui est, elle, aussi formée de notables). Les élites politiques françaises ne quittent pas facilement leurs postes, y compris pour d'autres candidats du même camp et du même profil. La bataille pour une "diversité démocratique", qui ne soit pas simplement "exotique" ou "cosmétique", suppose donc une réforme profonde des institutions (lutte contre le cumul des mandats, instauration d'une représentativité territoriale au profit des quartiers populaires, poursuite de la bataille de la parité…) et une véritable révolution des mentalités politiques : arrêter une fois pour toute de considérer les Français issus des migrations maghrébines, africaines et des DOM-TOM comme des "divers", des "marginaux" de la politique et les considérer comme des citoyens comme les autres. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la vraie diversité, c'est précisément de briser le "ghetto de la diversité" et de promouvoir une égalité effective de tous les citoyens, quelles que soient leurs origines régionales, culturelles et religieuses. C'est la conclusion de notre étude qui s'intitule "Discriminer pour mieux régner" mais qui aurait pu très bien s'appeler également "La diversité de diversion". Arrêtons d'employer des notions et des concepts "à la mode" qui permettent à certains de "se faire du beurre" sur le dos des "Arabes" et des "Noirs". On est en train de refaire les mêmes erreurs qu'avec l'intégration : on enferme les citoyens français dans des "cases ethniques", en laissant supposer que la France est composée de "légitimes" (les "bons Français") et d'illégitimes (les divers). La diversité est un concept de régression mentale, intellectuelle et politique qui sauve les apparences d'égalité sans résoudre les véritables problèmes de discriminations.
Source : Entretien Saphir News.
samedi 27 décembre 2008
Mahatma Gandhi

mardi 23 décembre 2008
Salma , musulmane émancipée en Grande-Bretagne

Vers 18 ans, la jeune Pakistanaise se plonge dans une traduction du Coran – celui-ci étant écrit en arabe, les musulmans non arabophones ne peuvent le comprendre. « J’ai compris que, contrairement à nos pratiques, le Coran prône l’égalité entre hommes et femmes. Je m’attendais à y lire des choses plus extrêmes. En fait, Dieu est miséricorde, il pardonne.
Salma et son mari ont trois garçons de 5, 10 et 12 ans. « Ils vont à l’école publique, parce qu’il y a davantage de mixité que dans le privé. » Avec son mari, leur langue commune est l’anglais, c’est aussi la langue de leurs enfants, qui ne parlent pas l’ourdou, la langue officielle du Pakistan. Comme toutes les mères du monde, elle est soucieuse quand elle pense à l’avenir de ses enfants. « Je redoute cette société dominée par la consommation, où seules comptent les apparences. » « Je voudrais que mes enfants retiennent l’importance de l’harmonie, de la tolérance, du respect pour la communauté. Je voudrais aussi qu’ils soient fiers d’être musulmans. Mais ils ne m’appartiennent pas, je ne peux pas être sûre que c’est la voie qu’ils suivront. »Cette militante anti-guerre s’est, avec l’accord de son mari, engagée en politique et a été élue en 2006 conseillère municipale à Birmingham. La campagne électorale était redoutable, provoquant des oppositions au sein de sa propre communauté, comme à l’extérieur. Son père et son mari ont reçu des menaces.
"Bâtir des ponts"
lundi 22 décembre 2008
Interview : Patrick Chamoiseau

Aux Antilles nous devrons aussi traiter des problèmes d’immigration, nous devrons aussi traiter des problèmes sociaux et des problèmes de sécurité, et il me semble qu’il ne faut absolument pas envisager de les traiter comme les traite monsieur Sarkozy. Pour nous le problème n’était pas de répondre à monsieur Sarkozy ou de l’interpeller mais de profiter de l’électrochoc que sa venue allait provoquer pour poser des problèmes qui nous concernent directement.
dimanche 21 décembre 2008
Martin Luther King (1929 - 1968) Un pasteur contre la ségrégation

jeudi 18 décembre 2008
Discriminations : d'abord sociales

mercredi 17 décembre 2008
DEVOIR DE MEMOIRE
Une association organisera cette rencontre avec l'histoire et la culture de l'île de La Réunion à Saint Denis. Vous trouverez sur ce lien, les infos sur cet évenement :
http://www.devoir2memoires.blogspot.com/
Yazid Sabeg, l'atout "diversité" de Sarkozy

D'après un article Le Point.
dimanche 14 décembre 2008
Le Reggae de Nicolas, fait au Burkina Faso
vous avez les paroles,
vous avez les images.
http://fr.youtube.com/watch?v=9k98p7wPABI
Rendez-vous au Karaoké du coin ou entre amis.
samedi 13 décembre 2008
Kwamé N'Krumah

Taubira: "Il faut se battre comme Obama"
http://quebec.jrgblog.com/tag/taubira-christiane/

mercredi 10 décembre 2008
Birmingham, l’autre exemple
>> Voir le reportage
Lozell Street
Lozell Street, au cœur des quartiers nord de Birmingham, bienvenue dans la banlieue version britannique… 80% d’immigrés : Jamaïcains, Pakistanais, Indiens ou encore Bangladeshis vivent ici. Dans Lozell Street, les églises côtoient les mosquées et les temples hindous… Dans ce melting-pot, tous sont égaux face à une chose au moins : la misère. Plus d’un quart des habitants est au chômage… A Lozell Street la lutte et le combat social ont toujours fait partie du décor…
Bini, porte-parole des noirs Bini est le porte-parole des noirs à Lozell,
il dirige un centre communautaire. Son combat a commencé à l’âge de 16 ans lorsqu’il a quitté sa Jamaïque natale et posé les pieds pour la première fois sur le sol britannique : « Ces photos montrent des manifestations contre la brutalité policière. Des brutalités auxquelles les Africains ont du faire face lorsqu’ils sont arrivés massivement dans ce pays dans les années 50.Le racisme conduit forcément les jeunes à des formes de protestation radicales. Les gens parlent de plus en plus du chômage dont ils sont victimes : la communauté africaine ici ou la communauté maghrébine en France. Des choses que personne ne veut prendre en compte. Il suffit alors d’un incident pour que les jeunes utilisent les seuls moyens qu’il leur reste pour dénoncer l’oppression et crier leur colère… »
Les incidents du 22 octobre


Le 22 octobre dernier encore, cette colère enflamait les esprits dans les rues de Lozell. Les affrontements entre bandes de jeunes asiatiques et Jamaïcains vont faire un mort… Voitures brûlées, vitrines de magasins fracassées, le quartier est au bord de l’explosion…Trois semaines plus tard il ne reste presque plus de traces de cette violence, la colère est retombée aussi vite qu’elle était montée. Ces images surtout sont inimaginables en France… Les bobbies, paisiblement et toujours sans armes ont repris leurs patrouilles en plein cœur du quartier. Là où la France, après 20 nuits d’émeutes, n’a toujours pas mis un terme à la violence, il aura fallu 2 nuits seulement à la police britannique pour ramener le calme.Bini : « Pour le moment la France a un plus gros problème que la Grande Bretagne, un problème vraiment plus sérieux. Nous avons eu des problème ici, mais ça a été réglé en une soirée, le lendemain tout est redevenu normal… »
Bini: « Les policiers ici sont tous du quartier. Nous les connaissons bien, ils font leur travail. La plupart des leaders de nos communautés les connaissent très bien, ils se rencontrent, organisent des réunions. Du coup ils arrivent facilement à stopper les problèmes »Nigel Smith est l’exemple même de cette police de proximité… 27 ans qu’il serre des mains dans ces rues… ici il connaît tout le monde. Du coup, même pendant les émeutes, à aucun moment la violence ne s’est focalisée sur la police… Le commissariat situé à quelques rues n’a pas été attaqué non plus…
Mohammed Hanif, un commissaire divisionnaire d’origine pakistanaise
Ndo et la révolution
Représentation des minorités dans les instances de décision

Une autre explication peut-être c’est la représentation des minorités dans la vie associative et politique. Nous sommes dans une des salles de l’école du quartier. Ce soir se tient la première réunion de conciliation depuis les émeutes. A Birmingham 120 conseillers municipaux sont élus et représentent les quartiers. Les trois élus du district de Lozell ce sont eux : une jeune femme sikh, un jamaïcain et un Pakistanais…..Nous retrouvons l’un de ces conseiller chez lui. Mahmood Hussein a eu un parcours politique illustre en Grande Bretagne, sa jeunesse jusqu'à l’âge de 11 ans il l’a pourtant passée dans les montagnes du Cachemire pakistanais… « Je vais vous trouver une photo de ma jeunesse, si j’en trouve une… C’est moi, voici ma femme, ma sœur et ici mon petit frère… »Parti de rien pour arriver jusqu’aux plus haute responsabilités. Mahmood Hussain est resté pendant deux ans le maire de la deuxième ville de Grande Bretagne : « Je suis arrivé dans ce pays en 1962, je ne parlais pas un mot d’anglais… Plus tard je suis devenu le maire de cette grande cité… Quand je suis arrivé ici mon père s’est installé à Blackpool. Quand je suis arrivé à l’école j’étais le seul enfant asiatique de l’école. Les premiers jours ont été très difficiles pour moi parce que je ne connaissais pas la langue et ce n’était pas possible de communiquer ou de se mélanger avec les autres enfants.
Des ghettos ethniques?
Sa politique d’intégration, la Grande Bretagne l’a développée à partir des années 80, lorsque partout dans les banlieues des grandes villes ont éclaté les émeutes les plus violentes de l’histoire du pays… Mais cette politique, peut-être la plus tolérante envers les minorités en Europe, a aussi connu quelques revers : elle a favorisé l’apparition de véritables ghettos ethniques et exclu chez certains, comme chez Moqapi, le sentiment d’appartenance à une nation : « Je me sens Africain. Je suis né en Angleterre mais je ne me vois pas comme un Britannique parce que le modèle britannique c’est blanc, anglo saxon et protestant. Je ne suis ni blanc, ni anglo saxon, ni protestant et je ne me reconnais donc pas dans ce que l’on appelle le modèle britannique, ou anglais… Ce que nous demandons, c’est comme tous les autres, notre place dans la société. Parce que nous travaillons ici, nous payons des impôts ici… Nous avons un centre pour notre communauté. Ça c’est à nous. Certains d’entre nous sont ici depuis 50 ans. Je ne sais pas quand ce sentiment d’appartenance à la Grande Bretagne descendra sur nous, mais je ne crois pas que cela arrivera un jour… Je ne me sens pas Britannique, je ne sais pas si mes enfants se sentent Britanniques et si leurs enfants se sentiront un jour Britanniques…. Mais je ne le pense pas… »
Extrait du site Arte: http://www.arte.tv/fr/cette-semaine/1036710,CmC=1096984.html
rf David Muntaner, Alexandre Rossignol et Hervé Thiry – ARTE GEIE - France 2005
Rencontre avec Adama Roamba
C’est un ami talentueux, très simple et sympathique. Voici les films d’Adama Romaba.
Humanitaire (2007), de Adama RoambaRencontre en ligne (2005), de Adama RoambaSource d'histoire (2003), de Adama RoambaMouka (2000), de Adama RoambaGarba (1999), de Adama Roamba
Voici un article sur le film Humanitaire.
http://www.africultures.com/index.asp?menu=affiche_film&no=1956
Voici une vidéo et un article du Petit sergent.
http://www.dailymotion.com/video/x3jesw_petit-sergent-adama-roamba_creation
http://www.clapnoir.org/articles/article_2006/petit_sgt.html
mardi 9 décembre 2008
L'ascension, loin de la politique
Pas de subvention quémandée à des élus locaux. Pas de local associatif obtenu après mille supplications. Pas de conseiller municipal qui supervise le conseil d'administration. "On ne se place plus en position de demandeurs, mais on veut être acteurs", explique le jeune patron, originaire de Bondy. Diplômé d'un master en conseil aux collectivités locales, il a ouvert son propre cabinet de recrutement avec l'idée d'agir avec les outils de l'entreprise. "La politique est fermée, dit-il. Les espaces qui restent sont les espaces professionnels. C'est là qu'on peut faire bouger la société."
Saïd Hammouche est à l'image des nouvelles élites issues des quartiers. Découragées par l'ostracisme des partis, elles ne font plus confiance à la politique. Fortement diplômées, elles privilégient la réussite professionnelle individuelle, le travail de réseau, pour faire carrière et se constituer une légitimité sociale incontestable. "On ne veut plus être dans l'assistanat, on ne veut plus du paternalisme, souligne El Yamine Soum, 29 ans, doctorant prometteur à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). Et comme on est nombreux à sortir de l'université avec des masters, ou plus, il y a de plus en plus de cadres, d'entrepreneurs, de chercheurs issus des quartiers." Ce que résume plus crûment un représentant de la nouvelle intelligentsia noire, trentenaire, surdiplômé et sans complexe - mais qui préfère rester anonyme : "Les jeunes issus des ZEP font de la finance pour rattraper en une génération le retard accumulé en dix générations. Et vous voulez leur parler des partis ? De figures comme Stéphane Pocrain (ex-porte-parole des Verts) ou Malek Boutih (ancien président de SOS-Racisme) ? On rigole."
Une élite qui a tiré profit de la "massification" de l'enseignement supérieur - même si l'absence de statistiques ethniques interdit d'avoir des données précises. Des juristes. Des ingénieurs. Des médecins. Des financiers. "Je suis bluffé par le nombre de bac + 4 ou de bac + 5 dans les quartiers", se réjouit Saïd Hammouche. Y compris, désormais, au sein des grandes écoles pionnières dans l'ouverture sociale. Comme Sciences Po, où les conventions ZEP mises en place en 2001 ont permis le recrutement de 477 élèves, dont 64 déjà diplômés ont commencé à peupler les étages de direction des cabinets d'audit, des sociétés de conseils et de la haute fonction publique. Un mouvement qui va encore s'amplifier : la promotion de 2001 ne comptait que 17 élèves issus des lycées de zone d'éducation prioritaire (ZEP), celle qui sortira en 2013 en compte 118. Ce n'est qu'un début, mais l'élite française commence à prendre des couleurs
Cette génération accumule les diplômes. Mais a aussi appris à se donner les mêmes armes relationnelles que le reste de l'élite. Zoubeir Ben Terdeyet, 30 ans, consultant en finance islamique, a découvert l'importance des réseaux à l'université, puis au moment d'entrer sur le marché du travail. "J'étais à Paris-X, à Nanterre. Les jeunes de banlieue allaient plutôt à l'UNEF pour militer sur le prix des tickets au restaurant universitaire. Ou pour faire une action sur le conflit palestinien. Les autres, ceux de Neuilly-sur-Seine, je les voyais aller à la Junior entreprise et réussir à se faire facturer des prestations par des entreprises." Lui obtient un master en finance. Brillant mais insuffisant. Faute de contacts dans le milieu de l'entreprise, il ne trouve pas d'emploi - comme cinq autres étudiants issus de banlieue.
Zoubeir Ben Terdeyet s'est donc lancé dans la construction d'un réseau pour les jeunes diplômés des quartiers. En 2004, il fonde avec quelques amis les Dérouilleurs - en référence au livre d'Azouz Begag sur les jeunes des quartiers qui réussissent à ne pas "rouiller" au pied des immeubles. La volonté de s'entraider. Le désir de faire "comme les autres", comme les anciens d'HEC, les anciens de Polytechnique, ceux d'Henri-IV, les Arméniens, les juifs, les Bretons... : partager les contacts et les relations. "Le marché parallèle de l'emploi est essentiel. Et l'information est ce qui vaut le plus cher", explique-t-il.
Informel, farouchement apolitique, le réseau a connu un développement exponentiel par le seul bouche-à-oreille. Grâce à une liste de diffusion créée sur Yahoo! et des soirées "networking", il compte aujourd'hui près de 4 000 membres, dont beaucoup de bac + 4 et bac + 5, avec des antennes à Strasbourg, Marseille, mais aussi à l'étranger. Les membres se signalent mutuellement les stages et les postes disponibles dans leur entreprise ou leur entourage. Ou font passer des CV de "frères" et de "soeurs" en recherche d'emploi. "On ne voulait pas de la génération de la marche des Beurs, complètement désillusionnée, raconte Zoubeir Ben Terdeyet, attablé devant son ordinateur portable, dans un bar branché du 9e arrondissement de Paris, où se retrouvent les Dérouilleurs. On voulait repartir sur des forces vives, motivées, avec un objectif de court terme - trouver des stages, des CDD, des CDI - et un objectif plus lointain - avoir un réseau pour nos enfants."
La politique n'est pas oubliée, mais ces nouvelles élites mettent en place une stratégie du détour. Gagner le respect professionnel. Conquérir sa légitimité pour ne pas se contenter des strapontins offerts par les politiciens. Et, plus que tout, ne jamais être dépendant d'un appareil. "On veut être libres et conserver notre liberté d'expression", explique Hamza Bouaziz, 30 ans, originaire de la cité Salvadore-Allende à Villetaneuse (Seine-Saint-Denis), titulaire d'un master en finance et économiste dans une filiale de BNP Paribas. "Avant de faire de la politique, il faut être fort économiquement. Il faut pouvoir être indépendant. Sinon vous finissez comme les types qui ont commencé par être payés par SOS-Racisme, puis par le PS", dit Zoubeir Ben Terdeyet.
Les modèles de ces élites ne sont pas des hommes politiques - hormis l'étoile Barack Obama, bien sûr. La figure qui revient est celle de Mehdi Dazi, 42 ans, inconnu du grand public, diplômé de Sciences Po, passé par les Etats-Unis pour contourner le plafond de verre français, devenu directeur général d'un fonds d'investissement des Emirats arabes unis, aujourd'hui membre du conseil de surveillance de Vivendi grâce à son parcours international. Un itinéraire qui fait rêver les jeunes diplômés. Et qui valide, à leurs yeux, l'idée que la stratégie du détour peut être la bonne pour conquérir la France. Comme lui, un nombre important de diplômés ont choisi de s'exiler dans les pays du Golfe. Au point que les Dérouilleurs ont créé à Dubaï une antenne d'une cinquantaine de membres
Ces élites maghrébines et noires en sont persuadées : si un Obama français devait apparaître, il ne sortirait pas du ventre d'un appareil politique. Mais plutôt du secteur privé. "Les entreprises sont plus avancées sur la question de la diversité. Constituer des équipes de clones ne les intéresse plus", relève Salah Houyem, Dérouilleur de 35 ans, titulaire d'un MBA, aujourd'hui cadre dans les ressources humaines au sein d'Areva. "Les partis ? Tout le monde sait que ça ne se passe plus là. Ils sont hors contexte, hors société", note l'écrivain Karim Amellal. A 30 ans, ce maître de conférences n'est pas, précisément, sur un strapontin : il dirige le mastère "affaires publiques" de Sciences Po, le coeur du réacteur de la prestigieuse institution.
Originaire de la cité sensible de la Fauconnière, à Gonesse (Val-d'Oise), Karim Amellal est passé par l'Institut d'études politiques de Paris avant la mise en place des conventions ZEP. Avec le collectif Qui fait la France ?, qui réunit des écrivains comme Faïza Guène, Mohamed Rezane ou Dembo Goumane, il défend une autre façon de faire de la politique. Hors des appareils. Pour ne parler que du fond, que du contenu, pour gommer les questions de carrière trop présentes dans les écuries partisanes. "Nous, on écrit, on va dans les lycées, on fait des conférences, on anime des ateliers d'écriture. C'est beaucoup plus utile", affirme-t-il.
Une prudence, un éloignement du politique, qui témoignent, paradoxalement, d'une forme avancée d'intégration. Une forme de banalisation, au fond, des élites maghrébines et noires. C'est la thèse que défend Marwan Mohamed, 33 ans, un rescapé de l'échec scolaire, qui avait arrêté l'école au CAP, avant de reprendre ses études jusqu'au doctorat, aujourd'hui une des figures montantes de la sociologie française. "Cette mise à distance de la politique peut être comprise comme une forme de conformisme social, dit-il. Les élites des quartiers font comme le reste des classes moyennes et bourgeoises : elles se placent aussi dans une logique individualiste." La résilience sociale et la "notabilisation", piliers de la carrière des futurs Obama français ? Réponse d'ici à dix ou vingt ans...
D'après un article Le Monde
lundi 8 décembre 2008
La France, mauvaise élève des droits de l'homme, selon Hessel

La France ne peut se targuer d'être exemplaire en matière de droits humains vu sa façon de traiter les étrangers et les prisonniers, estime Stéphane Hessel, co-auteur de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
A 91 printemps, le vieil homme aux manières délicieuses est l'invité permanent des cérémonies du 60e anniversaire de ce texte adopté le 10 décembre 1948 à Paris par les 48 pays membres de la toute jeune Organisation des Nations unies.
Ces cérémonies culmineront mercredi par une soirée au palais de Chaillot, où Stéphane Hessel lira le préambule de la Déclaration avant la projection de 22 courts-métrages réalisés par autant de metteurs en scène du monde entier.
Le diplomate avait à peine 30 ans lorsqu'il entama les travaux conduisant à la rédaction du texte.
Soixante ans plus tard, malgré son grand âge, l'ancien résistant, qui joua aussi les médiateurs pour les sans-papiers, veut rester un aiguillon pour les autorités françaises.
"Non, elle ne doit en aucun cas s'enorgueillir, c'est toujours mauvais", répond-il quand Reuters lui demande si la France de 2008 peut se vanter d'être encore la patrie des droits de l'homme.
"Elle doit constater que si elle fait certaines choses correctement il y en a d'autres qu'elle ne fait pas bien. Notamment, elle s'occupe mal de ses immigrés, elle s'occupe mal de ses sans-papiers et elle ne s'occupe pas bien du tout non plus des questions d'asile", ajoute-t-il.
En avril 2007, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France pour la façon dont elle renvoie les étrangers menacés dans leur pays d'origine.
Plus récemment, elle lui a demandé de surseoir à un projet de charter franco-britannique visant à rapatrier vers leur pays des Afghans en situation irrégulière.
"PAS À LA HAUTEUR"
"La France ne fait pas ce qu'elle devrait car elle a une tradition de pays d'immigration et de pays d'asile. Elle n'est pas la hauteur", regrette Stéphane Hessel.
Le diplomate se fait aussi le garant des droits des détenus à l'heure où les prisons françaises enferment plus de 64.000 personnes, un chiffre record qui s'ajoute à la multiplication des suicides de détenus -- plus d'une centaine cette année.
Le 16 octobre, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné Paris pour manquement à son obligation de "protéger le droit à la vie d'un détenu".
"Nous devrions faire un effort pour avoir des prisons un peu moins inhumaines", insiste Stéphane Hessel.
Distillées de débats en réunions, ses mises en garde visent d'abord l'Elysée.
"Tous mes messages, je les adresse toujours au président de la République française, quel que soit son nom", dit-il.
"Le nom actuel est celui d'un fils d'immigré. Donc s'il y a quelqu'un qui devrait savoir qu'il faut considérer l'immigration non comme un fléau mais comme une richesse, c'est bien notre président actuel Nicolas Sarkozy", fait-il remarquer à propos du chef de l'Etat, qui est d'origine hongroise.
Aux yeux de Stéphane Hessel, l'actuel président "pourrait en faire beaucoup plus", tout comme la secrétaire d'Etat aux Droits de l'Homme, Rama Yade. "Elle est très sympathique. Mais fait-elle assez pour promouvoir les droits de l'homme dans le monde ? Je n'en suis pas absolument convaincu."
Malgré ses critiques, Stéphane Hessel ne veut pas se laisser aller au pessimisme et relève les avancées obtenues en 60 ans sur le chemin des libertés.
"Il y a eu la fin du stalinisme, la fin de la colonisation, la fin de l'apartheid, nous avons un Tribunal pénal international pour juger les tyrans : bien sûr que les choses progressent", lançait-il le mois dernier lors d'un débat en présence de l'écrivain bangladaise Taslima Nasreen, chassée de son pays pour avoir critiqué les extrémistes islamistes.
Mais quand on lui demande si les Jeux olympiques de cet été à Pékin ont permis d'améliorer les droits humains en Chine, sa réponse est sans appel : "Ça n'a servi à rien."
D'après l'article Le Point
vendredi 5 décembre 2008
Nécrologie : Vishwanath Pratap Singh, ex-premier ministre indien

Son règne fut bref - onze mois à peine - mais il marque dans l'histoire contemporaine indienne un tournant : l'émergence de la caste dans le champ politique à la faveur de l'approfondissement des dispositifs de discrimination positive, boîte de Pandore ayant libéré de violents antagonismes autour du partage de la richesse. Figure morale mais habile politicien, il fut aussi le "tombeur" de Rajiv Gandhi, fils d'Indira Gandhi, inaugurant ainsi l'affaiblissement durable du Parti du Congrès - matrice de l'Inde indépendante - dans la politique nationale.