Le jour où, à 18 ans, Salma Yaqoob a décidé de revêtir le foulard, ses parents, d’honorables Pakistanais installés en Grande-Bretagne depuis les années 1960, se sont inquiétés. Sa mère devait-elle se sentir coupable de ne pas le porter ? Devaient-ils voir dans la décision de leur fille un changement radical envers la religion ? « Il a fallu que je les rassure, se souvient Salma . Je voulais qu’ils comprennent que pour moi, le hidjab est une affirmation, une façon de dire que mon corps m’appartient.
Mais le port du hidjab doit être libre, pas imposé comme en Iran ou en Arabie saoudite. »Les parents n’étaient pas au bout des surprises avec leur fille. « J’ai toujours été une enfant rebelle. À la maison, on parlait religion. Nous avions des coutumes que l’on assimilait à des pratiques religieuses, comme le fait que les hommes mangent avant les femmes. Mes cousines étaient mariées à l’âge de 16 ans, avec des hommes choisis par leurs parents. Cela me dérangeait. Je ne comprenais pas qu’il y ait deux poids deux mesures entre un homme et une femme.
À mes yeux, cela n’était pas juste. J’en voulais à la religion musulmane qui consacrait ces différences. Je pensais qu’elle donnait un chèque en blanc à tous ceux qui estimaient que les femmes étaient inférieures aux hommes. »Salma a soif de comprendre. Elle s’informe sur d’autres religions (judaïsme, hindouisme, bouddhisme, christianisme), s’intéresse à la théologie de la libération, au message de Martin Luther King. « J’ai rencontré des prêtres, j’ai beaucoup lu sur les camps de concentration, me demandant pourquoi Dieu n’était pas intervenu pour empêcher ça. Je m’interrogeais beaucoup sur ma foi. »
"Le Coran prône l’égalité entre hommes et femmes"
Vers 18 ans, la jeune Pakistanaise se plonge dans une traduction du Coran – celui-ci étant écrit en arabe, les musulmans non arabophones ne peuvent le comprendre. « J’ai compris que, contrairement à nos pratiques, le Coran prône l’égalité entre hommes et femmes. Je m’attendais à y lire des choses plus extrêmes. En fait, Dieu est miséricorde, il pardonne.
Vers 18 ans, la jeune Pakistanaise se plonge dans une traduction du Coran – celui-ci étant écrit en arabe, les musulmans non arabophones ne peuvent le comprendre. « J’ai compris que, contrairement à nos pratiques, le Coran prône l’égalité entre hommes et femmes. Je m’attendais à y lire des choses plus extrêmes. En fait, Dieu est miséricorde, il pardonne.
Dans le Coran, il est dit que l’on est comptable de ce que l’on fait. Tout cela était beaucoup plus en accord avec ce que je recherchais dans la religion. »Sa sœur et elle sont les deux premières femmes de la famille à avoir fait des études universitaires. « On s’est battues pour ça. J’ai dû convaincre mon père que le Prophète voulait qu’hommes et femmes soient éduqués. Et lui prouver que rien dans le Coran ne dit le contraire. » Diplômée en psychothérapie, Salma se marie à 24 ans avec un médecin d’origine pakistanaise comme elle.
Une nouvelle entorse à la tradition, qui veut que l’on se marie au sein de la famille élargie. Salma , tout comme sa famille, se revendique comme britannique, occidentale avec des origines asiatiques, de gauche et pratiquante : « une identité multiple ». « Nous avons fêté l’Aïd (NDLR : qui marque la fin du Ramadan), nous avons mangé de la nourriture pakistanaise, comme il se doit, mais aussi chinoise et italienne ! »
Militante anti-guerre
Salma et son mari ont trois garçons de 5, 10 et 12 ans. « Ils vont à l’école publique, parce qu’il y a davantage de mixité que dans le privé. » Avec son mari, leur langue commune est l’anglais, c’est aussi la langue de leurs enfants, qui ne parlent pas l’ourdou, la langue officielle du Pakistan. Comme toutes les mères du monde, elle est soucieuse quand elle pense à l’avenir de ses enfants. « Je redoute cette société dominée par la consommation, où seules comptent les apparences. » « Je voudrais que mes enfants retiennent l’importance de l’harmonie, de la tolérance, du respect pour la communauté. Je voudrais aussi qu’ils soient fiers d’être musulmans. Mais ils ne m’appartiennent pas, je ne peux pas être sûre que c’est la voie qu’ils suivront. »Cette militante anti-guerre s’est, avec l’accord de son mari, engagée en politique et a été élue en 2006 conseillère municipale à Birmingham. La campagne électorale était redoutable, provoquant des oppositions au sein de sa propre communauté, comme à l’extérieur. Son père et son mari ont reçu des menaces.
Salma et son mari ont trois garçons de 5, 10 et 12 ans. « Ils vont à l’école publique, parce qu’il y a davantage de mixité que dans le privé. » Avec son mari, leur langue commune est l’anglais, c’est aussi la langue de leurs enfants, qui ne parlent pas l’ourdou, la langue officielle du Pakistan. Comme toutes les mères du monde, elle est soucieuse quand elle pense à l’avenir de ses enfants. « Je redoute cette société dominée par la consommation, où seules comptent les apparences. » « Je voudrais que mes enfants retiennent l’importance de l’harmonie, de la tolérance, du respect pour la communauté. Je voudrais aussi qu’ils soient fiers d’être musulmans. Mais ils ne m’appartiennent pas, je ne peux pas être sûre que c’est la voie qu’ils suivront. »Cette militante anti-guerre s’est, avec l’accord de son mari, engagée en politique et a été élue en 2006 conseillère municipale à Birmingham. La campagne électorale était redoutable, provoquant des oppositions au sein de sa propre communauté, comme à l’extérieur. Son père et son mari ont reçu des menaces.
Mais aujourd’hui, Salma est la première et seule femme portant le hidjab au conseil municipal : « Une mini-révolution. » Une victoire ? « À condition, dit-elle, que l’on me considère comme la représentante de tous, et non des musulmans. »Tout irait pour le mieux si les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, puis ceux du 7 juillet 2005 à Londres – ceux-ci impliquaient des Pakistanais nés en Angleterre – n’avaient ébranlé la confiance entre la population musulmane et le reste de la société britannique. « Depuis, nous les musulmans, nous nous sentons sous forte pression. On a le sentiment d’être assiégés. Cette pression est encore accentuée par la guerre en Irak et en Afghanistan. Certains d’entre nous ont peur, d’autres sont en colère. Ces attentats étaient immoraux, anti-islamiques et politiquement irresponsables, puisqu’ils jetaient le discrédit sur toute une communauté. »
"Bâtir des ponts"
"Bâtir des ponts"
Salma a réagi en organisant une marche pour condamner les attentats. « Nous étions unis dans la peine. Parce que je crois en l’humanité, dans la solidarité, il fallait bâtir des ponts, parler haut et fort, sans quoi on allait penser que nous approuvions. Communiquer était indispensable. » Mais la confiance a été ébranlée. Cela a laissé des traces. « Il y a ce sentiment que les musulmans sont une menace culturelle, physique. Qu’ils sont l’ennemi. Il nous faut nous battre contre cette image répandue parmi une majorité de la population. Si nous critiquons le gouvernement, nous sommes vus comme des traîtres. La pression est plus forte pour que nous montrions notre loyauté. »
Et pourtant, la jeune femme continue à penser que le multiculturalisme existe en Grande-Bretagne, qu’« il y a toujours un espace de respiration ». « En tant que musulmane, je m’y sens plus à l’aise que dans d’autres pays qui sont musulmans. Ici, j’ai le droit de pratiquer ma religion, je peux voter, l’éducation est libre, il y a un système de santé, une justice, on s’occupe des gens vulnérables… En Arabie saoudite, il faudrait que je me batte pour mes droits. Ici, il y a un espace dans lequel nous nous sentons égaux. Mais il est menacé par les conflits extérieurs. » Alors, comme un nouveau défi, Salma se présentera aux prochaines élections législatives pour le Parlement britannique.
D'après le site La Croix.
1 commentaire:
Un bien bel article que voilà. Qui même s'il évoque rapidement met le doigt sur la liberté réelle de culte, et l'ouverture de la pratique du culte musulman. une ouverture gâchée par les anti islamistes, mais ces derniers ne sont pas les pires ennemis de la religion. ce sont surtout les extrémistes qui en s'affichant comme musulman lorsqu'ils revendiquent des actes barbares, portent le discrédit sur un communauté qui ne demande que l'ouverture à l'autre et une meilleure intégration qui, en France en tout cas, se fait encore attendre. Quant au parcours exemplaire et courageux c'est un exemple à suivre pour les femmes mais aussi pour les hommes qui doivent avoir le courage de remettre la raison et le consensus au goût du jour dans le rapport homme/femme et oublier les coutumes païennes vestiges de traditions obsolètes et inégalitaires.
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